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Balade organisée par la locale Ecolo de Ciney sur les traces des femmes dans les rues de Ciney

Cette balade organisée à l’occasion de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes par la locale Ecolo de Ciney voulait montrer que le peu de traces de femmes dans le passé que l’on retrouve à Ciney (comme dans d’autres villes) reflète encore bien la manière dont la société considère encore aujourd’hui les femmes. Par un froid bien vivifiant, deux groupes de maximum d’hommes et de femmes ont ainsi découvert leur ville au travers de différents thèmes.

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Le rendez-vous de la balade avait lieu dans la cour du Pascougui (ancienne gendarmerie) ce dimanche 14 mars, où le thème des violences faites aux femmes était abordé. Sur base d’une photo de femmes tondues dans la cour du Pascougui lors de la libération, le thème du corps des femmes dans la société, souvent perçu comme « propriété collective » est débattu. Le châtiment de la tonte (et parfois de la mise à nu partielle ou non) que l’on infligeait en plus aux femmes tient une place à part : cette punition a une connotation sexuelle très marquée. Elles sont punies par là où elles auraient fauté. C’est leur féminité qui est visée (la chevelure est le symbole de leur séduction). C’est parce qu’elles sont femmes et qu’elles ont été légères alors que beaucoup de citoyens et citoyennes étaient privés de tout, qu’il faut « laver » cette souillure par la tonte, effacer cette féminité honteuse. La tonte des cheveux n’est pas le châtiment d’une collaboration sexuelle mais le châtiment sexué d’une collaboration.

Le paysage cinacien est marqué par au moins trois stèles ou croix d’occis commémorant des féminicides à Leignon, Pessoux et Reux. Ce sont des meurtres de femmes faits par des hommes qui préfèrent tuer leurs victimes plutôt que de leur laisser la liberté. C’est une question de domination. Et ces stèles et ces croix d’occis qui reprennent les termes « martyres de leur chasteté » ou « elle aima mieux mourir que de perdre sa chasteté » amènent le débat sur la question du contrôle des femmes, de leur corps par l’Eglise et la société mais aussi la manière dont les médias traitent les sujets souvent comme faits divers.

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La rue Rempart des béguines est la seconde station de cette balade. D’où vient le choix de ce nom de rue alors qu’il n’y a jamais eu de béguinage ni de béguines à Ciney ?  Des Carmélites provenant de Leffe-Dinant s’étaient installées en 1455 dans la paroisse Saint-Georges de Leffe, dans l’ancien béguinage fondé au début du XVe siècle par Anne Besselle pour en faire un hospice pour les femmes âgées. Ces Carmélites prennent aussi le nom de Dames Blanches, en souvenir de ces « béguines ». C’est un essaim de trois Carmélites de Dinant qui ont fondé le couvent de Ciney en 1629 rue d’en Haut (ancien nom de la rue du Condroz) à l’emplacement actuel de la maison du Notaire Lambinet. D’où l’allusion aux béguines. 

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DSC_0025.jpegAu croisement de la rue de la Centenaire et de la rue Piconnette, on rappelle qu’à Ciney, il y a 29 rues qui portent le nom d’un homme, mais aucune ne porte le nom d’une femme. Certes, il y a bien des noms de rues attribués à des femmes : 4 noms en référence à des saintes ou religieuses (rue Sainte Barbe, rue Notre Dame de Hal, rue des Dominicaines et rue Rempart des Béguines), deux prénoms (rue Marette et rue du Bois Marguerite), un groupe de femmes (Clos des Macrales) et deux références à des femmes sans citer leur nom : rue de la Centenaire et rue de la Dauphine.  

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Le square Reine Astrid existait bien jusque dans les années 50 (on a même retrouvé une ancienne plaque de rue encore présente sur place) mais il a été remplacé par le square de la Renaissance. Cela met en lumière l’invisibilisation des femmes, le fait que les vécus des femmes, les paroles des femmes, les pensées des femmes, le travail des femmes soient globalement occultés, ‘silenciés’ dans l’espace public.  La centenaire, la Baronne Louise-Marie Aldegonde Van Eyll, était pourtant bien connue et son corps repose encore au cimetière de Ciney. La rue Piconnette est un toponyme qui «  désignait bien puits à l’origine, à Ciney, comme dans d’autres localités du Namurois, et que, conète, diminutif de con, doit se comprendre comme une métaphore sur la forme du puits en relation avec le sexe de la femme ».

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Rendez-vous ensuite au square Léopold II, pour aborder la notion de matrimoine, un mot utilisé depuis quelques années. Il est constitué de tout l’héritage culturel des femmes. C’est la mémoire des créatrices du passé (compositrices, autrices, plasticiennes, architectes, sculptrices, politiques,..) et de la transmission de leurs œuvres. La définition historique des mots ‘patrimoine’ et ‘matrimoine’ est liée à ce qu’on possède, mais cela met aussi en lumière ce qu’on est en droit de posséder en tant que femme. A Ciney, il s’est avéré difficile de trouver à Ciney des traces laissées par les femmes. Le centre culturel de Ciney travaillent d’ailleurs sur le sujet pour préparer les futures journées du patrimoine dont le thème sera cette année le matrimoine..  Des lieux, des bâtiments, ou des sites qui sont témoins de l’activité des femmes à Ciney, mais aussi des propriétés de femmes qui ont été offertes (dons pour la commune, la communauté religieuse, la construction d’une école,..) ont été émunérées : la maison de la Marquise, la chapelle Saint-Antoine à Achène, la chapelle Saint-Lambert à Haversin, les lavoirs, pompes et fontaines (de Pessoux, Reux, Ronvaux, Ychippe,..),

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Rue Walter Sœur, nous avons écouté la progression fulgurante de l’Institut de l’Enfant Jésus, qui était auparavant appelé la Maison Saint Joseph, une maison de retraite pour prêtres créée en 1885 par la Congrégation religieuse des Pauvres Sœurs de Mons. L’histoire de Sœur Zélie qui accueillait le premier enfant handicapé mental profond en 1992 suite à une demande des pouvoirs publics, et des nombreuses transformations qui ont été opérées pour pouvoir répondre aux très nombreuses demandes, jusqu’à l’inauguration au Tienne à la Justice de l’I.M.S, Les Chemins d’Ariane, selon un conception modulaire, plus adaptée à l'évolution de la prise en charge des personnes handicapées.

Et également ce fait d'histoire qui a valu, bien plus tard, à Soeur  Véronique (née Van Acker) et Soeur Andrée (née Frère) de recevoir la distinction de "Juste parmi les nations" par l’Etat d’Israël pour avoir accueilli de nombreux enfants juifs au sein de l’Institut de l’Enfant Jésus pendant la seconde guerre mondiale. C’est la plus haute distinction honorifique décernée à des civils non juifs : « Quiconque sauve une vie sauve l’univers tout entier ». Et de découvrir qu’à Ciney, d’autres femmes Justes parmi les Nations ont discrètement œuvré pour cacher des enfants juifs sur notre territoire : Anne-Marie Farina épouse de Walter de Selys Longchamps, Georgette Eloy, veuve de Monsieur Léopold Declaye, ainsi que ses parents et sa sœur Julia Siniat-Eloy, et enfin Anne Marie Hermant, une religieuse.

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Rue de la Station devant l’ancien domicile d’Eugénie d’Or, on découvre le parcours cinacien d’une femme qui faisait partie, pendant la seconde guerre mondiale, du mouvement de résistance Le Front de l’Indépendance de Ciney. Elle avait co-fondé en 1941 avec le français Maurice Dumont le journal clandestin de combat contre les traitres et les mauvais belges Vérités-Truth, qui était distribué à Ostende et à Ciney. Pendant deux ans, elle s’est occupée du tirage de celui-ci pour tout l’arrondissement de Dinant.

Maria de Villegas de Saint-Pierre, comtesse van den Steen de Jehay, infirmière, femme moderne, femme de lettres, humaniste et engagée, elle transforme le château de Chevetogne en hôpital de campagne dès le début de la guerre (août 1914), suivant les règles de la Croix-Rouge. Son parcours bien connu dans notre région est relaté dans plusieurs livres ainsi que dans un reportage de Matélé.

Le parcours de madame Thérèse Minette de Tillette épouse de Guillaume Léopold "Henri" de RADIGUÈS de CHENNEVIÈRE, et châtelaine condruzienne au Château Saint-Martin à Conneux, est particulièrement intéressant. Thérèse a œuvré pendant les deux guerres dans le domaine du renseignement et en particulier dans la région cinacienne.  Elle co-fonde avec Wather Dewéle réseau La Dame Blanche, le plus important réseau de résistance et de renseignements de Belgique pour la section du Secret Intelligence Service britannique opérant aux Pays-Bas. Ce réseau était constitué d’un tiers de femmes. Elle a, non seulement intégré son mari et ses six enfants dans le réseau, mais elle a également fait jouer toutes ses relations (tous les châtelains de sa région y sont intégrés).Elle s’est vu décerner la Croix de guerre 1914-1918 (Réseau "La Dame Blanche"), la Croix de guerre 1940-1945 (Réseau "Clarence") et a été reconnue comme, Membre de la résistance 1940-1945 (Réseau "Clarence"), croix d'officier du British Empire pour services rendu.

Sa fille Marie Antoinette de Radigues, épouse du Baron de Moffarts d'Houchenée, et son amie Clémie de l’Epine (39 médailles de guerre françaises) ont également été très actives. Elles ont notamment créés le poste de renseignements du réseau ferroviaire de Charleville et ce sera Henri Domelier, rédacteur en chef de La Dépêche des Ardennes qui en aura l’autorité. Marie-Antoinette a aussi décrit dans ses cahiers les faits marquants et événements tragiques qui se sont déroulés dans son village et sa région durant la grande guerre.

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Le dernier point de rendez-vous se situe devant la statue du monument aux morts, pour aborder la représentation des femmes à Ciney. Les arts décoratifs qui représentent la femme ne sont pas très nombreux à Ciney. On ne trouvera pas de statues de personnes célèbres comme on peut en voir dans les grandes villes. Les statues sont plutôt liées au folklore, au terroir de notre région, et est plutôt animalière. Mais, il y a tout de même quelques représentations de femmes.

Dans les arts décoratifs, la représentation de la femme est souvent sublimée : tantôt elle est une Madone ou une Vierge, symbole de pureté et de perfection, tantôt elle est un être fantastique et énigmatique. A Ciney, on découvre le magnifique sgraffite art nouveau situé sur le fronton d’une maison dans le haut de la rue Piervenne, on pense aux statues et madonne des grottes de Conjoux (un lieu mystique et de haut pèlerinage jusque dans les années 1930, abrite le plus grand nombre de statues, fabriquées en plâtre peint qui sont l'oeuvre de Monsieur Emile Biernaux, fabricant de statuaire à Namur), ou encore à la statue d’une femme aux formes voluptueuses de Georges Grard (1901-1984) dans le jardin devant le château du Parc Saint Roch, un sculpteur tournaisien.

La statuaire féminine dans les monuments aux morts n’est pas fréquente, comme c’est le cas à Ciney. Lorsque c’est le cas, on retrouve le plus fréquemment des monuments avec des allégories féminines (la Patrie, la victoire, la jeunesse, la liberté, la paix, la douleur.), des monuments qui combinent la figure du soldat et une allégorie féminine ou encore  des monuments avec des figures féminines réalistes (mères, épouses, sœurs ; veuves, ouvrières, paysannes, infirmières, résistantes, ..).  Même s’il y a des monuments commémoratifs et stèles dans tous les villages de l’entité, il n’y a qu’une seule statuaire féminine, c’est celle du monument aux morts 14-18 et 40-45 situé Place Monseu à Ciney, qui représente la Belgique.

Pour en savoir plus !

Rendez-vous lors des journées du patrimoine où le thème sera le matrimoine. La locale Ecolo y compte proposer la balade effectuée dimanche dernier avec quelques petites surprises non dévoilées dans ce texte ! 

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